Nus, Fabien Maréchal

L'Escalier


Fabien Maréchal est l'auteur d'un recueil de nouvelles paru aux éditions dialogues en 2011. Pas plus tard qu'hier je rouvrais Nouvelles à ne pas y croire, et je relisais Nus, une de mes favorites. 

Ce texte fait partie de ceux dans lesquels vous avez parfois envie - comme pour une musique - de vous replonger. Soit parce qu'il vous rappelle quelque chose, soit que vous aimez la sensation ou les images qu'il procure, ou encore parce qu'il vous reste, peut-être, quelque chose à comprendre. Bref, il fallait que vous je fasse part d'un extrait avant que, de toute urgence maintenant, vous vous procuriez ce recueil.

"La tenue des Martin comportait-elle une certaine part d'artifice ? À bien y réfléchir, ce n'est pas impossible. Appuyer sur le bouton de la sonnette complètement nu doit-il être considéré comme un raffinement absolu dans le détachement ou comme un j'm'en-foutisme intégral ?
Ils étaient nus, tous les deux, et de la tête aux mollets. Aux pieds, ils avaient conservé des sandales. Pour le reste, rien, si ce n'est les poils d'Henri. Hélène n'en avait pas, nulle part, voilà ce que j'ai remarqué en premier. Je n'affirme pas que cela m'ait choqué. C'était juste inattendu, sur l'instant, quasiment plus que leur nudité commune. Sans doute, dans l'image que je m'étais forgée d'eux, je les considérais déjà comme libérés de certaines convenances, en dépit de leur statut social. Je ne m'attendais pas à ce que Martine et Henri arrivent nus, bien entendu - je n'aurais jamais envisagé de les voir ainsi un jour. Or, bizarrement, ce n'est pas cela qui m'a frappé d'entrée. En revanche, que le sexe de Martine soit rasé m'a estomaqué. Je croyais que cela ne se voyait que dans les films pornos. Un préjugé, je comprends désormais. Y compris dans mes rêves, je n'ai jamais été jusqu'à concevoir Hélène rasée. Je ne m'était même pas demandé ce que cela me ferait."