Paul O. se souvient de cet air


On habitait une ancienne ferme prêt du carrefour, le village était au-dessus de nous et brillait comme les restes d'un avion qui aurait volé trop bas et qui se serait payé le haut de la colline ; architecture à angle droit et incendies. Le soir j'aimais bien regarder les lumières. Je préférais ça que les étoiles. C'était l'époque des walkman à cassette et j'avais toujours une compile sous la main. Il n'y avait pas encore d'internet, pas encore de médiathèques où tu pouvais emprunter des CD, alors il fallait faire avec des morceaux enregistrés à la radio et les disques qui arrivaient jusque là... Je devais avoir quelque chose comme une dizaine de cassettes différentes, mais elles commençaient toutes avec le même morceau : Romeo had Juliet de Lou Reed. Avant d'aller me coucher je sortais dehors, j'appuyais sur play, je me tournais vers le village et je sentais l'odeur des champs. Je connais toujours les paroles de la chanson par cœur. Parfois une voiture passait sur la route sans ralentir au carrefour.


Lou Reed, Romeo had Juliette (live performance)