John Corigliano, Mr Tambourine Man : Seven Poems of Bob Dylan, Naxos, 2008


Dans les notes du livret, John Corigliano dit qu'il avait déjà mis cinq poètes en musique avant de s'attaquer à Bob Dylan sur les conseils d'un ami. Il explique que bien sûr il a entendu des folks ballades de Dylan dans les années 60, mais qu'à l'époque il était occupé avec Stravinsky et Copland. Il a décidé de ne surtout pas écouter les musiques de Dylan, et de ne travailler qu'à partir du texte.

Il y a un fossé entre le "folk music" et l'interprétation que Corigliano met en place. Nous ne sommes pas dans le mélange des genres. Là où par exemple avec Master Of War, Dylan chante sur une mélodie basique et répétitive, lancinante pourrait-t-on dire, la soprano Hila Plitmann et l'orchestre font monter la pression sur une musique tonitruante et saccadée. Idem pour All Along the watchtower où ça hurle beaucoup... les paroles sont appuyées de façon lyrique dans le chant et soutenues à grand renforts d'effets musicaux par l'orchestre avec une alternance de moments calmes et d'attaques soudaines. Difficile de savourer savourer un passage calme... on a toujours la trouille que ça reparte en sucette de cymbale, de cuivres et de vents.

All Along The Watchtower version de John Corigliano par Hila Plitmann (Soprano) et le Buffalo Philharmonic Orchestra dirigé par JoAnn Falletta.


La suite de poèmes se tient, mais les brusques sautes de l'orchestre qui font penser à de soudaines crises d'épilepsie peuvent heurter l'oreille. Il m'a fallu du temps pour m'habituer au Salomé de Strauss... Il en va peut-être de même avec Corigliano et le souffle lyrique qu'il utilise pour mettre en musique les textes de Dylan.

Les Three Hallucinations (from Altered States) (1981) qui figurent aussi sur le disque forment un triptyque instrumental basé sur une musique écrite pour Altered States (Ken Russel, 1980) plus facile d'abord, quoi que tout de même assez stressant. On serait tenté de dire qu'il n'y a rien de "beau" ou d"agréable" là-dedans à part le deuxième mouvement quelque peu nostalgique. Mais c'est - comme pour la Suite Mr Tambourine Man - très évocateur, ici un maëlstrom qui s'accorde bien avec le titre. La musique n'a pas seulement vocation à être belle, mais là elle est éprouvante. Enfin, je le répète, il s'agit aussi sûrement ou peut-être d'habituer son oreille.

Mr. Tambourine Man : Seven Poems of Bob Dylan (2003) a d'abord été composé pour soprano et piano en 2000.