Wayne Shorter, Speak No Evil, Blue Note, 1964



Gamin, Wayne Shorter et son frère dévoraient les bd et les films de série B avec extra-terrestres, monstres, loup-garou, vampires et créatures de Frankenstein. Speak No Evil clôt l'année 1964, où Wayne a participé à l'enregistrement de 20 disques dont 3 avec les Jazz Messenger, 9 avec Miles Davis, 3 avec Gil Evans, 1 avec Lee Morgan, 1 avec Grachan Moncur III et Night Dreamer puis Juju en tant que leader. L'album s'inscrit dans la lignée bop, un bop avec un soupçon d'étrangeté - mais on en est pas encore au Weather Report - et Wayne Shorter précise : I was thinking of Misty landscapes with wild flowers and strange, dimly-seen shapes-the kind of places where folklore and legend are born. And then I was thinking a thing like witchburnings, too*. La session d'enregistrement du 24 décembre 1964 menée par Rudy Van Gelder parle de magie, de sorcière, de diable, de danse de cadavres et de fleurs sauvages ; 6 compositions de Wayne Shorter avec Freddie Hubbard à la trompette, Herbie Hancock au piano, Ron Carter à la basse et Elvin Jones à la batterie. Dance Cadaverous est une composition un peu décalée, piano sophistiqué qui se promène du côté du classique. Quelque chose d'étrange - comme dans les compositions de Monk - et de planant se glisse dans la mélodie vers le milieu du morceau, la rythmique est plutôt cool. Shorter dit à propos du morceau : I was thinking of some of these doctor pictures in wich you see a classroom and they're getting ready to work on a cadaver*. On se penchera aussi avec bonheur sur le jeu d'Herbie Hancock pour Infant Eyes, la balade, où le saxophone tenor de Wayne balance du velours. A l'instar de Witch Hunt qui ouvre l'album, le disque sonne de manière nonchalante, mais faut pas s'y tromper, c'est du lourd que nous avons là. Des mélodies un peu bizaroïdes qui une fois rentrées dans la caboche risque fort de continuer à trotter.

*Notes extraites du livret de Don Heckman.

Wayne Shorter, Witch Hunt