Brèves d'étagère


Homicides
Black Mony est une maison d’édition - fondée par David Dufresne (documentariste, passionné de musique, auteur du livre Yo ! Révolution rap) et son pote Yannick Bourg (auteur d’une aventure du Poulpe, critique rock, fondateur de la revue Combo, auteur) accompagné d’Hervé Dessoubs - disparue en 1992. Cette maison d’édition éphémère a aussi réédité deux romans de Fredric Brown (Meurtres en filigrane et Ca ne se refuse pas)

Avec un peu de chance on peut dégoter, chez un bouquiniste, leur recueil de nouvelles Homicides. Couverture noir, blanc, rouge, le fameux tryptique couleur. A l’intérieur, on trouve dix textes accompagnés de dix illustrations et d’une petite note d’introduction pour chacune. Une de ces bonnes trouvailles imprévues.

Joe R. Lansdale dans une histoire d’amour vache / André Héléna pour une aventure de petits truands savoureuse / Norman Spinrad dans une histoire de SF optimiste pour le genre humain / Traven, ô toujours aussi fascinant dans son exploration de l’âme humaine / JB. Pouy pour un délire rock /Heilmann et son écriture stylisée / Yannick Bourg et son tueur Sado qui rencontre l’Enfer / Marc Villard avec un monologue de type lourd aux petits oignons / Delcour surprenant, sincère, parle de l’auteur / JP. Manchette, le journaliste, le pouvoir et le mensonge dans une nouvelle toujours intéressante.

Ketchup Karma
Quand le Dortmunder de Westlake (pour le côté gangsters sympathiques) rencontre les dialogues vifs des premiers Tarantino, ça donne une grosse poilade. De celles qui tire une larme joyeuse.

Samuel Fuller, gangster retiré du circuit pour cause d’affaire qui a mal tourné, est extirpé de sa retraite tranquille lorsqu’on vient lui commanditer un meurtre. Et là, cascade de portraits de tarés, entre Bug sorti de l’hôpital psychiatrique, Lloyd en fauteuil roulant, Bob avec sa gueule moitié arrachée qui croit perpétuellement que ses fringues brûlent, et Charley apprenti chef gangster. Voilà l'équipe en train de monter un plan pour escroquer une bande de trafiquants de drogues.

Histoire banale au pays du polar. Intervient l’excellent travail de l’auteur, qui ne manque pas de mêler à l’humour quelques coups bien sentis, comme dans cette scène lors d’une manifestation anti-avortement :

« Une jeune rousse toute minuscule, les cheveux courts, la vingtaine, parcourait l’arrière de la foule avec à la main une boîte en carton blanche.
- Vous avez quoi là-dedans ? s’enquit Charley.
Elle leva vers lui un regard triste et vert et tendit le carton vers nous. Il contenait un fœtus mort, qui paraissait presque à terme.
- Comment quiconque peut-il faire une chose pareille ? demanda-t-elle.
- Quoi ? Mourir recroquevillé dans un carton ? C’est pas dur. Suffit qu’il fasse assez froid, dit Charley. »

350 pages en état d’hallucination et de dépendance. Un livre indégotable en librairie, commandé sur le net, débusqué grâce à une chronique judicieuse de M. Mesplède. L’auteur a commis un autre roman, pas traduit en Français, et silence radio… Dommage !